Les protestants sont-ils en train d'évoluer dans leur conception de la papauté? Certains d'entre eux en tout cas, animés par le désir de l'unité des chrétiens, donnent des signes marquants
d'ouverture sur cette question.
Le problème de la primauté de l'évêque de Rome sur les autres évêques divise en effet les protestants et les catholiques depuis le XVIe siècle et constitue aujourd'hui un obstacle majeur à
l'aboutissement du dialogue œcuménique.
En 1995, dans son encyclique Ut unum sint, Jean-Paul II, sans renoncer à l'idée que le pape doive représenter un principe de communion et être gardien
de l'unité, a voulu que le débat théologique soit ouvert avec les autres confessions, et a appelé les responsables chrétiens à "un dialogue fraternel et patient, dans lequel nous pourrions nous
écouter au-delà des polémiques stériles". Mais cette suggestion est restée sans suite.
Or le 18 avril dernier, l'évêque luthérien allemand Ulrich Fischer a déclaré : "L'idée de la reconnaissance d'une primauté d'honneur pour le pape a toujours été
envisagée avec dédain, mais pour le débat œcuménique en cours, il s'agit néanmoins d'une proposition productive, qui a été faite il y a environ 15 ans par le pape Jean-Paul II, et qui a assez
injustement suscité peu de réactions positives dans les milieux protestants".
L'évêque s'est exprimé au cours de célébrations commémoratives de la mort de Philippe Melanchthon, proche collaborateur de Martin Luther, et a déclaré que Melanchton pouvait
être considéré "comme un précurseur du mouvement œcuménique moderne", lui qui était prêt "à reconnaître la primauté du pape sur les évêques selon la loi humaine si cela pouvait servir
l'unité de l'Eglise".
De son côté le pape actuel, Benoît XVI, est salué par les luthériens. Après la visite qu'il a rendue à la communauté évangélique luthérienne de Rome, le pasteur Jens-Martin Kruse a signé
dans L’Osservatore Romano du 23 avril un éditorial où il a présenté le pape comme un "modèle dans la foi", y compris pour les protestants. Il a aussi parlé d'un pape toujours prêt à accomplir,
s'agissant de l'oecuménimse, "des gestes qui expriment la communion, qui consolident la foi et, en même temps, ont une force visionnaire".