Au cours de mon cursus de psychologie, j'ai pu faire connaissance d'une pathologie qui m'a interpellé. Il est question de la névrose.
Le vulgaris médical la définie ainsi :
Affection psychiatrique se caractérisant par des troubles du comportement dont le malade est conscient, mais qu'il
ne peut dominer. Elle se traduit par des troubles de l'affectivité et de l'émotivité, mais le malade garde ses fonctions mentales intactes. En effet, contrairement à la psychose, la
névrose n'altère pas gravement la personnalité. D'une manière générale, la névrose est due à un conflit psychique non résolu (impossibilité de choisir entre 2 pulsions contradictoires, d'intégrer
un interdit, de surpasser un traumatisme, ...). En fait, c'est une étape de la maturité psychique qui n'a pas été franchie.
On parle de névrose de transfert, ou psychonévrose, quand l'origine du trouble est liée à un conflit ancien.
On appelle névrose actuelle celle provoquée par un traumatisme récent ou à une souffrance narcissique. Ceci entraîne des
troubles psychiatriques, plus ou moins graves suivant le type de névrose : Suite
La névrose est un conflit intérieur, un conflit entre le ça et le surmoi, entre le conscient et l'inconscient, entre les désirs intérieurs et notre morale qui les interdits. La morale ou le surmoi, est gravé dans le psychisme au sortir du complexe d'Oedipe. Le père en posant ses limites grave deux lois. L'interdit du meurtre du parent du même sexe et l'interdit de l'inceste du parent du sexe opposé. Dans l'idéal toutefois car il y a exception en ce qui concerne la névrose hystérique. Mais venons en au fait. Le problème n'est pas nouveau. Le Docteur Pierre Solignac publia un livre portant le titre "La Névrose Chrétienne" en 1976. Une émission d'Apostrophe l'avait reçu et vous pourrez en suivre la présentation en introduction ici.
Nous avons au sein même de la bible des passages qui semblement névrotiques, nous n'en citerons que deux de Saint Paul :
Quand les païens, qui n’ont point la loi, font naturellement ce que prescrit la loi, ils sont, eux qui n’ont point la loi, une loi pour eux-mêmes ; ils montrent que l’œuvre de la loi est écrite dans leurs cœurs, leur conscience en rendant témoignage, et leurs pensées s’accusant ou se défendant tour à tour. (Rm 2, 14-15)
Mais le plus caractéristique d'entre eux se trouve dans Romains 7
7 Qu’est-ce à dire ? Que la Loi est péché ? Certes non ! Seulement je n’ai connu le
péché que par la Loi. Et, de fait, j’aurais ignoré la convoitise si la Loi n’avait dit : Tu ne convoiteras pas !
8 Mais, saisissant l’occasion, le péché par le moyen du précepte produisit en moi toute espèce de
convoitise : car sans la Loi le péché n’est qu’un mort.
9 Ah ! je vivais jadis sans la Loi ; mais quand le précepte est survenu, le péché a pris
vie
10 tandis que moi je suis mort, et il s’est trouvé que le précepte fait pour la vie me conduisit à la
mort.
11 Car le péché saisit l’occasion et, utilisant le précepte, me séduisit et par son moyen me
tua.
12 La Loi, elle, est donc sainte, et saint le précepte, et juste et bon.
13 Une chose bonne serait-elle donc devenue mort pour moi ? Certes non ! Mais c’est le
péché, lui, qui, afin de paraître péché, se servit d’une chose bonne pour me procurer la mort, afin que le péché exerçât toute sa puissance de péché par le moyen du précepte.
14 En effet, nous savons que la Loi est spirituelle ; mais moi je suis un être de chair, vendu
au pouvoir du péché.
15 Vraiment ce que je fais je ne le comprends pas : car je ne fais pas ce que je veux, mais je
fais ce que je hais.
16 Or si je fais ce que je ne veux pas, je reconnais, d’accord avec la Loi, qu’elle est
bonne ;
17 en réalité ce n’est plus moi qui accomplis l’action, mais le péché qui habite en moi.
18 Car je sais que nul bien n’habite en moi, je veux dire dans ma chair ; en effet, vouloir le
bien est à ma portée, mais non pas l’accomplir :
19 puisque je ne fais pas le bien que je veux et commets le mal que je ne veux pas.
20 Or si je fais ce que je ne veux pas, ce n’est plus moi qui accomplis l’action, mais le péché qui
habite en moi.
21 Je trouve donc une loi s’imposant à moi, quand je veux faire le bien : le mal seul se
présente à moi.
22 Car je me complais dans la loi de Dieu du point de vue de l’homme intérieur ;
23 mais j’aperçois une autre loi dans mes membres qui lutte contre la loi de ma raison et m’enchaîne
à la loi du péché qui est dans mes membres.
24 Malheureux homme que je suis ! Qui me délivrera de ce corps qui me voue à la
mort ?
25 Grâces soient à Dieu par Jésus Christ notre Seigneur ! C’est donc bien moi qui par la raison
sers une loi de Dieu et par la chair une loi de péché.
Ce passage nous montre bien la nature de ce conflit intérieur. Et c'est ainsi que la névrose issue du péché originel se saisit de la doctrine chrétienne pour se donner une bonne raison d'exister. Mais tout cela est il véritablement chrétien au fond ?
Voici la vidéo d'une conférence du père Samuel Rouvillois qui nous met sur une piste importante. Cette conférence est un peu longue mais pas du tout ennuyeuse :
Si vous avez des problèmes pour la visualiser, vous pourrez l'écouter en cliquant sur ce lien.
En résumé, la névrose est elle chrétienne ? Non. La culpabilité est elle chrétienne ? Non plus. Toutes deux proviennent de la rupture que le péché originel a provoqué en l'homme. La culpabilité n'est pas de Dieu dans le sens où elle nous coupe de la relation d'avec Lui et les autres. Nous perdons peu à peu l'assurance de Sa miséricorde. La culpabilité nous enferme en nous même "A cela nous saurons que nous sommes de la vérité, et devant lui nous apaiserons notre cœur, si notre cœur venait à nous condamner, car Dieu est plus grand que notre cœur, et il connaît tout." (1 Jn 3, 19-20). J'oserais m'avancer en disant que notre culpabilité est un regard faussé de nous sur nous même, un reliquat du regard de Dieu sur nous que l'image du Dieu condamnant n'arrange pas. Pour sortir de la culpabilité il nous faut considérer le regard de Dieu et de l'autre (miséricordieux) sur nous même. La culpabilité nous empêche aussi d'offrir à l'autre la miséricorde que Dieu veut déverser à travers nous, on a plus facilement tendance à rendre les autres responsable de nos déficience que d'avancer vers l'autre avec nos déficiences pardonnées.