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ARTICLE VII  :  Les ministres ont violé l'autorité de l'Eglise  

Je ne suis pas maintenant en grande peine de montrer combien vos ministres ont avili la sainteté et majesté de l'Église. Ils crient haut et clair qu'elle a demeuré 800 ans en adultère et antichrétienne, dès saint Grégoire jusqu'à Wyclif que Bèze tient pour le premier restaurateur du christianisme. Calvin se voudrait bien couvrir par une distinction, disant que l'Église peut errer en choses non nécessaires au salut, non dans les autres, mais Bèze confesse librement qu'elle a tant erré qu'elle n'est plus Église; et cela n'est ce pas errer en choses nécessaires au salut ? même qu'il avoue que hors de l'Église il n'y a point de salut. Il s'ensuit donc de son dire, quoiqu'il se tourne et contourne de tous côtés, que l'Église a erré dans les choses nécessaires au salut : car, si hors de l'Église on ne trouve point de salut, et si l'Église a tant erré qu'elle n'est plus Église, certes en elle il n' a point de salut; or on ne peut perdre le salut qu'en se détournant des choses nécessaires au salut, elle a donc failli en choses nécessaires au salut : autrement, ayant ce qui est nécessaire au salut elle serait la vraie Église, ce qui ne se peut. Et de Bèze dit qu'il a appris cette façon de parler de ceux qui l'ont instruit en sa religion prétendue, c'est-à-dire, de Calvin; et de vrai, si Calvin pensait que l'Église romaine n'eut pas erré dans les choses nécessaires au salut il eut eu tort de s'en séparer, car y pouvant faire son salut, et y étant le vrai christianisme, il eut été obligé d'y demeurer pour son salut, lequel ne pouvait être en deux lieux différents.

On me dira peut être que de Bèze dit bien que l'Église Romaine qui est aujourd'hui erre en choses nécessaires, et que partant il s'en est séparé, mais qu'il ne dit pas que la vraie Église ait jamais erré. Mais on ne se peut échapper de ce côté-là : car, quelle Église y avait-il au monde il y a deux cents, trois cents, quatre cents et cinq cents ans, sinon l'Église Catholique romaine, toute qu'elle est à présent ? Il n'y en avait point d'autre sans doute; donc, c'était la vraie Église et néanmoins errait, ou il ni avait point de vraie Église au monde : et en ce cas-là encore est-il contraint d'avouer que cet anéantissement était venu par erreur intolérable et en choses nécessaires au salut, car, quant à cette dissipation de fidèle et secrète Église, j'en ai déjà assez fait voir la vanité ci-devant; outre cela que quand ils confessent que l'Église visible peut errer, ils violent l'Église à laquelle Notre Seigneur nous adresse en nos difficultés, et que saint Paul appelle colonne et pilier de vérité (1 Timothée, 3 : 15), car ce n'est que de la visible de laquelle s'entendent ces témoignages, sinon qu'on voulut dire que Notre Seigneur nous eut renvoyé à parler à une chose invisible, imperceptible et du tout inconnue, ou que saint Paul enseignait son Timothée à converser en une assemblée de laquelle il n'eut aucune connaissance. Mais ce n'est pas violer tout le respect et la révérence due à cette Reine Epouse du Roi céleste d'avoir ramené sur ses terres quasi toutes les troupes que ci-devant, avec tant de sang, de sueurs et de travaux, elle avait par solennelle punition bannies et chassées de ses confins, comme rebelles et conjurées ennemies de sa couronne, j'entends, d'avoir remis sur pied tant d'hérésies et fausses opinions que l'Église avait condamnées comme entreprenant la souveraineté sur l'Église, absolvant ceux qu'elle a condamnés, condamnés ceux qu'elle avait absous ? Voici des exemples.

Simon le Mage disait que Dieu était cause du péché, dit Vincent de Lérins, mais Calvin et Bèze n'en disent rien de moins, le premier au traité De l'éternelle prédestination, le second en la Réponse à Sébastien Castalio. Quoiqu'ils nient le mot ils suivent la chose et le corps de cette hérésie, si hérésie se doit appeler, non athéisme; de quoi tant de doctes hommes les convainquent par leurs propres paroles que je ne m'y amuserai pas.

Judas, dit saint Jérôme, pensait que les miracles qu'il voyait partir de la main de notre Seigneur fussent opérations et illusions diaboliques; je ne sais si vos ministres pensent ce qu'ils disent, mais que disent-ils quand on produit les miracles, sinon que ce sont sorcelleries ? Les glorieux miracles que Notre Seigneur fait au Mondevis, au lieu de vous ouvrir les yeux, qu'en dites vous ?

Les Pépuziens, dit saint Augustin, ou Montanistes et Phriges comme les appelle le Code (De Haeret. l, I; Tit. V, 5), admettaient à la dignité de la prêtrise les femmes; qui ne sait que les frères Anglais tiennent Elisabeth leur Reine pour chef de leur Église ?

Les Manichéens, dit saint Jérôme, niaient le libre arbitre : Luther a fait un livre contre le libre arbitre, qu'il appelle De servo arbitrio; de Calvin je m'en rapporte à vous (Amb., Ep 83 , Manichaeos ob Dominicae diei jejunia jure damnamus).

Les Donatistes croyaient que l'Église s'était perdue en tout le monde, et qu'elle leur était demeurée seulement à eux; vos ministres parlent ainsi. Encore croient-ils qu'un mauvais homme ne peut baptiser; Wyclif en disait tout autant, que j'apporte en jeu parce que de Bèze le tient pour un glorieux réformateur. Quant à leurs vies, voici leurs vertus : ils donnaient le très précieux Sacrement aux chiens, ils jetaient le saint Chrême à terre, ils renversaient les autels, rompaient les calices et les vendaient, ils rasaient la tête des prêtres pour lever la sacrée onction, ils levaient et arrachaient le voile des nones pour les profaner.

Jovinien, au témoignage de saint Augustin (I De haerisibus, ad quodvult Deus, c 82), voulait qu'on mangeant en tout temps et contre toute prohibition toutes sortes de viandes, disait que les jeûnes n'étaient pas méritoires devant Dieu, que les sauvés étaient égaux en gloire, que la virginité n'était rien de plus que le mariage, et que tous les péchés étaient égaux : chez vos maîtres on enseigne la même chose.

Vigilance (comme écrit saint Jérôme, 1. Adversus Vigilantium, et 2 epistolis adversus eunem) nia qu'on dut avoir en honneur les reliques des saints, que les prières des saints fussent profitables, que les prêtres dussent vivre en célibat, la pauvreté volontaire : ne niez-vous pas de tout ceci ?

Eustathius méprisa les jeûnes ordinaires de l'Église, les traditions ecclésiastiques, les lieux des saints martyrs et les basiliques de dévotion. Le récit en est fait par le Concile Gangrense, in praefatione, où pour ces raisons il fut déclaré anathème et condamné. Voyez-vous combien vos réformateurs en ont condamnés ?

Eunomius ne voulait point céder à la pluralité, dignité, antiquité, comme témoigne saint Basile contre Eunomius. Il disait que la seule foi suffisait au salut et justifiait, Aug, haer. 54. Quant au premier trait, voyez de Bèze en son traité Des marques de l'Église; quant au second, n'est-il pas d'accord avec cette tant cette sentence de Luther, que de Bèze tient pour très glorieux réformateur : Vides quam dives sit homo Christianus sive baptizatus, qui etiam volens non potest perdere salutem suam, quantiscumque peccatis, nisi nolit credere?

Arius, au récit de saint Augustin, niait la prière pour les morts, les jeûnes ordinaires, et la supériorité de l'Evêque par dessus le simple prêtre; vos ministres nient tout cela.

Lucifer appelait son église seulement la vraie église, et disait que l'Église ancienne, d'Église était devenue une mauvaise maison, Hier., Contra Lucif.; et que crient vos ministres tout le jour ?

Les Pélagiens se tenaient assurés et certains de leur justice (Hieron., adver Pel 1 III, 17-18)), promettaient le salut aux enfants des fidèles qui mouraient sans baptême (Aug., 1. VI contra Julianum, c II et III), ils tenaient tous les péchés pour mortels (Hier 1. II). Quant au premier, c'est votre ordinaire langage, et celui de Calvin in Antidoto, sess 6 ; le second et troisième est trop trivial parmi vous pour en dire autre chose.

Les Manichéens rejetaient les sacrifices de l'Église et les images; et qu'ont fait vos gens ?

Les Messaliens méprisaient les ordres sacrés, les églises et les autels, comme dit saint Damascène, Haer 80 ; Ignatius (apud Theodoretum, Dialogo 3 qui dicitur Impatibilis) : Eucharistias et oblationes non admittunt, quod non confiteantur Eucharistiam esse carnem Servatoris nostri Jesu Christi, quae pro peccatis nostris passa est, quam Pater benignitate suscitavit; contre lesquels a écrit saint Martial, Epistola ad Burdegalenses. Berengaire voulut dire le même longtemps après, et fut condamné par trois Conciles, aux deux derniers desquels il abjura son hérésie.

Julien l'Apostat méprisait le signe de la Croix, Soc. 1. 3 c. 2; aussi faisait Xénaïas, l. 16 c 27 ; les Mahométans n'en font rien de moins, Damascène, Haeresi centesima. Mais qui voudra voir ceci bien au long, qu'il voie Sander, l 8 c 57, De visib Monarch Eccl et Belarmin, in notis Ecclesiae. Voyez-vous les moules sur lesquels vos ministres ont jeté et formé leur réforme ?

Or sus, cette seule alliance d'opinions, ou pour mieux dire, cet étroit parentage et consanguinité, que vos premiers maîtres avaient avec les plus cruels, envieillis et conjurés ennemis de l'Église, vous devait-elle pas détourner de les suivre et vous ranger sous leurs enseignes ? Je n'ai noté pas une hérésie qui n'ait été tenue pour telle en l'Église que Calvin et Bèze confessent avoir été vraie Église, à savoir, dans les premiers cinq cents ans du Christianisme. Ah ! je vous prie, n'est-ce pas fouler aux pieds la majesté de l'Église, que de produire comme réformes et réparations nécessaires et saintes, ce qu'elle a tant abominé lors qu'elle était en ses plus pures années, et qu'elle avait terrassé comme impiété, ruine et dégât de la vraie doctrine ? L'estomac délicat de cette céleste Epouse n'avait pu soutenir la violence de ces venins, et les avait rejetés avec un tel effort que plusieurs veines de ses martyrs en étaient éclatées, et maintenant vous le lui représentez comme une précieuse médecine. Les Pères que j'ai cités ne les eussent jamais mis au rôle des hérétiques qu'ils n'eussent vu le corps de l'Elise les tenir pour tels; c'étaient des plus orthodoxes, et qui étaient confédérés à tous les autres évêques et docteurs catholiques de leur temps, qui montre que ce qu'ils tenaient pour hérétique l'était à bon escient. Imaginez-vous donc cette vénérable antiquité, au ciel, autour du Maître, qui regarde vos réformateurs; ils y sont allés combattant les opinions que les ministres adorent, ils ont tenu pour hérétiques ceux dont vous suivez les pas; penses-vous que ce qu'ils ont jugé erreur, hérésie, blasphème et ariens, manichéens, en Judas, ils le trouvent maintenant sainteté, réforme, restauration ? Qui ne voit que c'est ici le plus grand mépris qu'on peut faire à la majesté de l'Église ? Si vous voulez venir à la succession de la vraie et sainte Église de ces premiers siècles, ne contrevenez donc pas à ce qu'elle a si solennellement établie et constituée . Personne ne peut être héritier en partie, et en partie non; acceptez l'héritage résolument : les charges ne sont pas si grandes qu'un peu d'humilité n'en face la raison, dire adieu à ses passions et opinions, et passer compte du différend que vous avez avec l'Église; les honneurs sont infinis, d'être héritiers de Dieu, cohéritiers de Jésus-Christ (Romains, 8 : 17), en l'heureuse compagnie de tous les bienheureux..    

 

CHAPITRE III : Les Marques de l'Église

ARTICLE PREMIER    DE L'UNITÉ DE L'ÉGLISE - LA MARQUE PREMIÈ0RE : LA VRAIE ÉGLISE DOIT ÊTRE UNE EN UN CHEF

 

1. - Combien de fois et en combien de lieux, l'Église, tant militante que triomphante, et à l'Ancien et au Nouveau Testament, soit appelée maison et famille, il me semblerait temps perdu d'en vouloir faire recherche, puisque cela est tant commun dans les Ecritures que ceux qui les ont lues n'en douteront jamais, et qui ne les a pas lues, incontinent qu'il les lira, il trouvera quasi partout cette façon de parler. C'est de l'Église que saint Paul dit à son cher Timothée (1 Tim 3, 15) : Ut scias quomodo oporteat te conversari in domo Dei, quae est Ecclesia, columna et firmamentum veritatis; c'est d'icelle que David dit : (Ps 88, 5) Beati qui habitant in domo tua Domine ; c'est d'elle que l'Ange dit : Reganbit in domo jacob in aeternum; c'est d'elle que Notre Seigneur : In domo patris mei mansiones multae sunt (Jean 14, 2), Simile est regnum caelorum homini patrifamilias, Mat 20; et en cent mille autres lieux.

Or, l'Église étant une maison et une famille, le maître de cette maison, il ne faut pas douter qu'il n'y en a qu'un seul, Jésus-Christ, ainsi est-elle appelée maison de Dieu. Mais ce Maître et Père de famille, s'en allant à la droite de Dieu son Père et ayant laissé plusieurs serviteurs en sa maison, voulut en laisser un qui fut serviteur en chef, et auquel les autres se rapportassent; ainsi dit Notre Seigneur : Quis putas est servus fidelis et prudens, quem constituit Dominus super familiam suam ? Et de vrai, s'il n'y avait un maître valet en une boutique, pensez comment le trafic irait, s'il n'y avait pas un roi en un royaume, un paron [Littré : parons, un père et une mère des oiseaux de proie ?] en un navire, et un père de famille en une famille, et de vrai ce ne serait plus une famille; mais écoutez Notre Seigneur : Omnis civitas vel domus divisa contra se non stabit (Matthieu, 12 : 25). Jamais une province ne peut être bien gouvernée d'elle-même, principalement si elle est grande. Je vous demande, Messieurs les clairvoyants, qui ne voulez pas qu'en l'Église il y ait un chef, me sauriez-vous donner exemple de quelque gouvernement d'apparence auquel tous les gouvernements particuliers ne se soient rapportés à un ? Il faut laisser à part les Macédoniens, Babyloniens, Juifs, Mèdes, Perses, Arabes, Syriens, Français, Espagnols, Anglais, et une infinité des plus remarquables, dans lesquelles la chose est claire. Mais venons aux républiques : dites-moi, où avez-vous vu quelque grande province qui se soit gouvernée d'elle-même ? Jamais. La plus belle partie du monde fut une fois de la république des Romains, mais une seule Rome gouvernait, une seule Athènes, Carthage, et ainsi des autres anciennes, une seule Venise, une seule Gênes, une seule Lucerne, Fribourg et autres. Jamais vous ne trouverez que toutes les parties de quelque notable et grande province se soient employées à se gouverner soi-même, mais fallait, faut et faudra que ou un homme seul, ou un seul corps d'hommes résidant en quelque lieu, ou une seule ville, ou quelque petite portion d'une province, ait gouverné le reste de la province, si la province était grande. Messieurs qui vous plaisez dans les histoires, je suis assuré de votre voix, vous ne permettrez pas qu'on m'en démente. Mais supposé, ce qui est très faux, que quelque province particulière se fut gouvernée d'elle-même, comment pourrait-on dire de l'Église chrétienne, laquelle est si universelle qu'elle comprend tout le monde ? Autrement, il faudrait toujours avoir un concile debout de toutes les évêchés, et qui l'avouera ? Il faudrait que tous les évêques fussent toujours absents de leur diocèse, et comment pourrait se faire cela ? Et si tous les évêques étaient pareils, qui les assemblerait ? Mais quelle peine serait-ce, quand on aurait quelque doute en la foi, de faire assembler un concile ? Il ne se peut nullement donc faire, que toute l'Église, et chacune de ses partie, se gouverne elle-même sans se rapporter l'une à l'autre.

Or, puisque j'ai suffisamment prouvé qu'il faut qu'une partie se rapporte à l'autre, je vous demande la partie à laquelle on se doit rapporter. Ou c'est une province : si c'est une province, où est elle ? Ce n'est pas l'Angleterre, car quand elle était catholique, où lui trouvez-vous ce droit ? Si vous proposez une autre province, où sera elle ? Et pourquoi plutôt celle-ci qu'une autre ? Outre ce que pas une province n'a jamais demandé ce privilège. Si c'est une ville, il faut que ce soit l'une des patriarcales : or, des patriarcales il n'y en a que cinq, Rome, Antioche, Alexandrie, Constantinople et Jérusalem. Laquelle des cinq ? Toutes sont païennes, excepté Rome. Si  donc ce doit être une ville, c'est Rome, si une assemblée, c'est celle de Rome. Mais non; ce n'est ni une province, ni une ville, ni une simple et perpétuelle assemblée, c'est un seul homme- chef, constitué sur toute l'Église : Fidelis servus et prudens, quem constituit Dominus.

Concluons donc que Notre Seigneur, partant de ce monde, afin de laisser unie toute son Église, il laissa un seul gouverneur et lieutenant général, auquel on doit avoir recours en toute nécessité.

2. - Ce qu'étant ainsi, je vous dis que ce serviteur général, ce dispensateur et gouverneur, ce maître valet de la maison de Notre Seigneur, c'est saint Pierre, lequel a raison de cela peut bien dire : O Domine, quia ego servus (Psaumes, 115 : 6) ; et non pas seulement servus, mais doublement, quia qui bene praesunt duplici honore digni sunt (1 Timothée, 5 : 17); et non seulement servus tuus, mais encore filius ancillae tuae. Quand on a quelque serviteur de race, à celui-ci on se fie davantage, et lui baille-t-on volontiers les clefs de la maison; donc non sans cause j'introduis saint Pierre, disant O domine, etc., car il est serviteur bon et fidèle (Matthieu, 25 : 21-23) auquel, comme à un serviteur de race, le Maître a baillé les clefs : Tibi dabo claves regni caelorum (Matthieu, 16 : 19). Saint Luc nous montre bien que saint Pierre est ce serviteur, car, après avoir raconté (12 : 37) que Notre Seigneur avait dit par avertissement à ses disciples : Beati servi quos cum venerit Dominus invenerit vigilantes ; amen, dico vobis, quod praecinget se, et faciet illos discumbere, et transiens ministrabit illis, saint Pierre seul interrogea Notre Seigneur (verset 41) : Ad nos dicis hanc parabolam an et ad omnes ? Notre Seigneur, répondant à saint Pierre, ne dit pas : Qui putas erunt fideles, comme il avait dit beati servi, mais, Quis putas est dispensator fidelis et prudens, quem constituit Dominus super familiam suam ut det illis in tempore tritici mensuram ? Et de fait, Théophylacte dit que saint Pierre fit cette demande comme ayant la suprême charge de l'Église, et saint Ambroise, l. 7, 131, sur saint Luc, dit que les premières paroles, beati, s'entendent de tous, mais les secondes, quis putas, s'entendent des évêques, et beaucoup plus proprement du Souverain. Notre Seigneur, donc, répond à saint Pierre comme voulant dire : ce que j'ai dit en général appartient à tous, mais à toi particulièrement, car, qui penses-tu être le serviteur prudent et fidèle ?

Et de vrai, si nous voulons un peu éplucher cette parabole, qui peut être le serviteur qui doit donner le froment sinon saint Pierre, auquel la charge de nourrir les autres a été donnée : Pasce oves meas (Jean, 21 : 17) ? Quand le maître de la maison va dehors, il donne les clefs au maître valet et économe, et n'est-ce pas à saint Pierre auquel Notre Seigneur a dit : Tibi dabo claves regni caelorum ? (Matthieu, 16 : 19) Tout se rapporte au gouverneur, et le reste des officiers s'appuient sur celui-ci, quant à l'autorité, comme tout l'édifice sur le fondement. Ainsi saint Pierre est appelé pierre sur laquelle l'Église est fondée : Tu es Képhas, et super hanc petram (verset 18) : or est-il que Képhas veut dire en syriaque une pierre, aussi bien que sela en hébreu, mais l'interprète latin a dit Petrus, pour ce qu'en grec il y a Petros, qui veut aussi bien dire pierre comme petra; et Notre Seigneur, en saint Matthieu, 7, dit que l'homme sage fait sa maison et la fonde sur le rocher, supra petram : en quoi le diable, père de mensonge, singe de Notre Seigneur, a voulu faire certaine imitation, fondant sa malheureuse hérésie principalement en un diocèse de saint Pierre, et en une Rochelle. De plus, Notre Seigneur demande que ce serviteur soit prudent et fidèle, et saint Pierre a bien ces deux conditions : car, la prudence comme lui peut-elle manquer, puisque ni la chair ni le sang ne le gouvernent point, mais le Père céleste (verset 17) ? Et la fidélité comment lui pourrait-elle faillir, puisque Notre Seigneur dit : Rogavi pro te ut non deficeret fides tua (Luc, 22 : 33) ? Lequel il faut croire que exauditus est pro sua reverentia (Hébreux, 5 : 7), de quoi il donne bien bon témoignage quand il ajoute (Luc ubi supra) : Et tu conversus confirma fratres tuos, comme s'il voulait dire : j'ai prié pour toi, et partant confirme les autres, car pour les autres je n'ai pas prié sinon qu'ils eussent un refuge assuré en toi.

 

3. - Concluons qu'il fallait donc que Notre Seigneur abandonnant son Église quant à son être corporel et visible, laissât un lieutenant et vicaire général visible, et celui-ci c'est saint Pierre, dont il pouvait bien dire : O Domine, quia ego servus tuus. Vous me direz, oui, mais Notre Seigneur n'est pas mort, et d'abondant il est toujours avec son Église, pourquoi donc lui baillez-vous un vicaire ? Je vous réponds que n'étant pas mort il n'a point de successeur, mais seulement un vicaire, et d'abondant, qu'il assiste vraiment son église en tout et partout de sa faveur invisible, mais, afin de ne faire pas un corps visible sans un chef visible, il a encore voulu l'assister en la personne d'un lieutenant visible, par le moyen duquel, outre les faveurs invisibles, il administre perpétuellement son Église en manière et forme convenable à la suavité de sa disposition.

Vous me direz encore, qu'il n'y a point d'autre fondement que Notre Seigneur en l'Église : Fundamentum aliud nemo potest ponere praeter id quod positum est, quod est Christus Jesus (1 Corinthiens, 3 : 11). Je vous accorde que tant la militante que la triomphante Église sont fondées sur Notre Seigneur comme sur le fondement principal, mais Isaïe nous prédit qu'en l'Église on devait avoir deux fondements, au chap. 28, 16 : Ecce ego ponam in fundamentis Sion lapidem, lapidem probatum, angularem, praetiosum, in fundamento fundatum. Je sais bien comment un grand personnage l'explique, mais il me semble que ce passage-là d'Isaïe se doit du tout interpréter sans sortir du chap. 16 de saint Matthieu, l'Evangile d'aujourd'hui (28, 13). Là donc Isaïe, se plaignant des Juifs et de leurs prêtres en la personne de Notre Seigneur, de ce que ils ne voudraient pas croire : Manda, remanda, expecta, reexpecta, et ce qui s'ensuit, ajoute : Idcirco haec dixit Dominus, et partant le Seigneur a dit : Ecce ego mittam in fundamentis Sion lapidem.

Il dit : in fund amentis, à cause qu'encore les autres Apôtres étaient les fondements de l'Église : Et murus civitatis, dit l'Apocalypse (21 : 14), habens fundamenta duodecim, et in ipsis duodecim, nomina duodecim Apostolorum Agni, et ailleurs (Ephésiens, 2 : 30) : Fundati super fundamenta Prophetarum et Apostolorum, ipso summo lapide angulari Christo Jesu, et le Psalmiste (Psaumes, 86 : 1) : Fundamenta ejus in montibus sanctis; mais entre tous il y en a un lequel par excellence et supériorité est appelé pierre et fondement, et c'est celui auquel Notre Seigneur a dit :: " Tu es Képhas ", id est, Lapis.

Lapidem probatum. Ecoutez saint Matthieu (16, 13 suiv.); il dit que Notre Seigneur y jettera une pierre éprouvée : quelle preuve voulez-vous autre que celle-là : Quem dicunt homines esse Filium hominis ? Question difficile à laquelle saint Pierre, expliquant le secret et ardu mystère de la communication des idiomes, répond si pertinemment que rien plus, et fait preuve qu'il est vraiment Pierre, disant : Tu es Christus, Filius Dei vivi.

Isaïe poursuit et dit : lapidem praetiosum. Ecoutez l'estime que Notre Seigneur fait de saint Pierre : Beatus es, Simon Bar Jona.

Angularem. Notre Seigneur ne dit pas qu'il fondera une seule muraille de l'Église, mais toute, Ecclesiam meam. Il est donc angulaire in fundamento fundatum, fondé sur le fondement; il sera le fondement mais non pas premier, car il y aura déjà un autre fondement, Ipso summo lapide angulari Christo (Ephésiens supra). Voilà comme Isaïe explique saint Matthieu, et saint Matthieu, Isaïe. Je n'aurais jamais fait si je voulais dire tout ce qui me vient au-devant de ce sujet.  

 

ARTICLE II   L'ÉGLISE CATHOLIQUE EST UNIE EN UN CHEF VISIBLE, CELLE DES PROTESTANTS NE L'EST POINT ET CE QUI S'ENSUIT    

Je ne m'amuserai pas beaucoup en ce point. Vous savez que tous, tant que nous sommes catholiques, reconnaissons le Pape comme Vicaire de Notre Seigneur : l'Église universelle le reconnut dernièrement à Trente, quand elle s'adressa à lui pour confirmation de ce qu'elle avait résolu, et quand elle reçut ses députés comme présidents ordinaires et légitimes du Concile. Je perdrais temps aussi de vous prouver que vous n'avez point de chef visible; vous ne le niez pas. Vous avez un suprême Consistoire, comme ceux de Berne, Genève, Zurich et les autres, qui ne dépend d'aucun autre. Vous êtes si éloignés de vouloir reconnaître un chef universel, que même vous n'avez point de chef provincial; les ministres sont autant parmi vous l'un que l'autre, et n'ont aucune prérogative au Consistoire, ainsi sont inférieurs, et en science et en voix, au président qui n'est pas ministre. Quant à vos évêques ou surveillants, vous ne vous êtes pas contentés de les ravaler jusqu'aux rangs de ministres, mais les avez rendus inférieurs, afin de ne rien laisser en sa place. Les Anglais tiennent leur Reine pour chef de leur Église, contre la pure parole de Dieu : si ne sont-ils pas désespérés, que je sache, qu'ils veuillent qu'elle soit chef de l'Église Catholique, mais seulement de ces misérables pays.

Bref, il n'y a aucun chef parmi vous autres dans les choses spirituelles, ni parmi tout le reste de ceux qui font profession de contredire au Pape. Voici maintenant la suite de tout ceci : la vraie Église doit avoir un chef visible en son gouvernement et son administration ; la vôtre n'en a point, donc la vôtre n'est pas la vraie Église. Au contraire, il y a une Église au monde, vraie et légitime, qui a un chef visible, il n'y en a point qui en ait un que la Nôtre, la Nôtre donc seule est la vraie Église. Passons outre

 

ARTICLE III    DE L'UNITÉ DE L'ÉGLISE EN LA FOI ET CRÉANCE LA VRAIE ÉGLISE DOIT ÊTRE UNIE EN SA DOCTRINE

Jésus-Christ est-il divisé ? (1 Corinthiens, 1 : 13) Non, en vrai, car Il est Dieu de paix non de dissension, comme saint Paul enseignait par toutes les Eglises (1 Corinthiens, 14 : 33). Il ne se peut donc faire que la vraie Église soit en dissension ou division de créance et de doctrine, car Dieu n'en serait plus auteur ni époux, et, comme royaume divisé en soi-même (Matthieu, 12 : 25), elle périrait. Tout aussitôt que Dieu prend un peuple à soi, comme il a fait l'Église, il lui donne l'unité de cour et de chemin. L'Église n'est qu'un corps, duquel tous les fidèles sont membres, joints et liés ensemble par toutes les jointures (Ephésiens, 4 : 16); il n'y a qu'une foi et un esprit qui anime ce corps . Dieu est en son saint lieu, il rend sa maison peuplée de personnes de même sorte et intelligence (Psaumes, 67 : 6, 7); donc la vraie Église de Dieu doit être unie, liée, jointe et serrée ensemble dans une même doctrine et créance.

 

ARTICLE IV  :  L'ÉGLISE CATHOLIQUE EST UNIE EN CRÉANCE, LA PRÉTENDUE RÉFORMÉE NE L'EST POINT

" Il faut ", dit saint Irénée [au IIe siècle] (Contra Haeresiae, 1. III, c. III), " que tous les fidèles s'assemblent et viennent se joindre à l'Église romaine, pour sa plus puissante principauté ". " C'est la mère de la dignité sacerdotale " ce disait Jules 1er. C'est " le commencement de l'unité de la prêtrise " (Epistolae I ad Orient., Vide Concil, an. 336), " c'est le lien d'unité ", se dit Saint Cyprien ; " Nous n'ignorons pas qu'il y a un Dieu, qu'un Christ et Seigneur, lequel nous avons confessé, un Saint-Esprit, un Évêque dans l'Église catholique ". Le bon Optatus disait ainsi aux Donatistes : " Tu ne peux nier que tu ne saches qu'en la ville de Rome la principale chaire a été premièrement conférée à saint Pierre, en laquelle a été assis le chef de tous les Apôtres, saint Pierre, qui fut appelé Képhas, chaire en laquelle l'unité fut de tous gardée, afin que les autres Apôtres ne voulussent pas se prétendre et défendre chacun la sienne, et que dès lors celui-là fut schismatique et pécheur, qui voudrait se bâtir une autre chaire contre cette unique chaire. Donc, en cette unique chaire, qui est la première des prérogatives, fut assis premièrement saint Pierre " (De Scism Donat , 1. II). Ce sont presque les paroles de cet ancien et saint Docteur. Tous, tant qu'il y a de catholiques en cet âge, sont dans la même résolution; nous tenons l'Église romaine pour Notre rendez-vous en toutes nos difficultés, nous sommes tous ses humbles enfants et prenons nourriture du lait de ses mamelles, nous sommes les branches de cette tige si féconde et ne tirons aucun suc de doctrine que de cette racine. C'est ce qui nous tient tous parés d'une même livrée de créance, car, sachant qu'il y a un chef et lieutenant général en l'Église, ce qu'il résout et détermine avec l'avis des autres prélats, lorsqu'il est assis sur la chaire de saint Pierre pour enseigner le christianisme, sert de loi et de niveau à Notre créance. Qu'on coure tout le monde et partout on verra la même foi dans les catholiques; que s'il y a quelque diversité d'opinions, ou ce ne serait pas en  chose appartenant à la foi, ou tout incontinent que le Concile général ou le Siège romain en aura déterminé, vous verrez chacun se ranger à leur définition. Nos entendements ne s'égarent point les uns des autres en leurs créances, ainsi se maintiennent très étroitement unis et serrés ensemble par le lien de l'autorité supérieure de l'Église, à laquelle chacun se rapporte en toute humilité, et y appuie sa foi comme sur la colonne et fermeté de la vérité (1 Timothée, 3 : 15) ; notre Église catholique n'a qu'un langage et un même parler sur toute la terre.

Au contraire, Messieurs, vos premiers maîtres n'eurent pas plus tôt été sur pied, ils n'eurent pas plus tôt pensé de se bâtir une tour de doctrine et de science qui allait toucher à découvert dans le ciel, et leur acquit la grande et magnifique réputation de réformateurs, que Dieu, voulant empêcher cet ambitieux dessein, permit entre eux une telle diversité de langage et de créance, qu'ils commencèrent à se cantonner qui ça qui là, que toute leur besogne ne fut qu'une misérable Babel et confusion. Quelles contrariétés a produit la réforme de Luther : je n'aurais jamais fait si je les voulais tout mettre sur ce papier;  qui les voudra voir lira le petit livre de Frédéric Staphyl, De Concordia Discordi, Sander, livre 7, de sa Visible monarchie, et Gabriel de Préau, en la Vie des hérétiques. Je dirai seulement ce que vous ne pouvez pas ignorer et que je vois maintenant de mes yeux.

Vous n'avez pas un même canon des Ecritures; Luther n'y veut pas l'épître de Saint Jacques, que vous recevez. Calvin tient être contraire à l'Ecriture qu'il y ait un chef en l'Église; les Anglais tiennent le contraire. Les huguenots français tiennent que selon la Parole de Dieu les prêtres ne sont pas moindres que les évêques; les Anglais ont des évêques qui commandent aux prêtres, et entre eux, deux archevêques, dont l'un est appelé Primat, nom auquel Calvin veut si grand mal. Les Puritains en Angleterre tiennent comme article de foi qu'il n'est pas loisible de prêcher, baptiser, prier dans les églises qui ont été autrefois aux catholiques, mais on n'est pas si dépité de ça : mes notes que j'ai dites qu'ils le tiennent pour article de foi, car ils souffrent et les  bannissements et les prisons plutôt que de s'en dédire. Ne savez-vous  pas qu'à Genève l'on tient pour superstition de célébrer aucune fête des Saints ? Et en Suisse on les fait, et vous en  faites une de Notre-Dame. Il ne s'agit pas ici que les uns le fassent, les autres non, car ce ne serait pas contrariété de religion, mais ce que vous et quelques Suisses observez, les autres le condamnent comme contraire à la pureté de la religion. Ne savez-vous pas que l'un de vos plus grands ministres dit à Poissy que le " Corps de Notre Seigneur était aussi loin de la cène que la terre du ciel " (Théodore de Bèze) ? et ne savez-vous pas encore que cela est tenu pour faux par plusieurs des autres? L'un de vos maîtres n'a-il pas confessé dernièrement la réalité du Corps de Notre Seigneur en la cène, et les autres ne la nient-ils pas ? Me pourrez-vous nier, qu'au fait de la justification vous soyez autant divisés entre vous que vous l'êtes d'avec nous ? Témoin l'Anonyme disputeur. Bref, chacun parle son langage à part, et de tant d'huguenots auxquels j'ai parlé, je n'en ai jamais trouvé deux de la même créance.

Mais le pire est que vous ne vous sauriez accorder; car ou prendrez-vous un arbitre assuré ? Vous n'avez point de chef en terre pour vous adresser à lui en vos difficultés; vous croyez que l'Église même peut s'abuser et abuser les autres; vous ne voudriez mettre votre âme en main si peu assurée, ou vous n'en tenez pas grand compte.

L'Ecriture ne peut être votre arbitre, car c'est de l'Ecriture même de quoi vous êtes en procès, voulant les uns l'entendre d'une façon, les autres de l'autre. Vos discordes et disputes sont immortelles si vous ne vous rangez à l'autorité de l'Église: Témoin les colloques de Lunebourg, de Mulbrun, de Montbéliard et celui de Berne récemment, témoin aussi Tilmann Heshusius et Eraste, témoin Brence et Bulinger. Certes, la division qui est entre vous au nombre  des Sacrements est remarquable : maintenant, communément, parmi vous on ne met que deux sacrements ; Calvin en a mis trois, ajoutant au baptême et cène, l'ordre; Luther y met la pénitence pour troisième puis dit qu 'il n'y en a qu'un ; enfin les protestants au colloque de Ratisbonne, auquel se trouva Calvin, témoin Bèze en sa Vie, confessèrent qu'il y avait sept sacrements. En l'article de la toute puissance de Dieu, comment est-ce que vous y êtes divisé ? Pendant que les uns nient qu'un corps puisse être, vu par la vertu divine, en deux lieux, les autres nient toute puissance absolue, les autres ne nient rien de tout cela. Que si je voulais vous montrer les grandes contrariétés qui sont en la doctrine de ceux que de Bèze reconnaît tous pour glorieux réformateurs de l'Église, à savoir Jérôme de Prague, Jean Hus, Wyclif, Luther, Bucer, Œcolampade, Zwingli, Poméran et les autres, je n'aurais jamais fini : Luther seul vous instruira assez de la bonne concorde qui est entre eux, en la lamentation qu'il fait contre les Zwingliens et Sacramentaires, qu'il appelle Absalons, Judas et esprits svermériques (fanatiques), l'an 1527. Feu son Altesse de très heureuse mémoire, Emmanuel Philibert, raconta au docte Anthoyne Possevin qu'au colloque de Wormace, quand on demanda aux protestants leur confession de foi, tous, les uns après les autres, sortirent hors de l'assemblée, pour ne se pouvoir accorder ensemble. Ce grand prince est digne de foi et il raconte ceci pour y avoir été présent. Toute cette division a son fondement au mépris que vous faites d'un chef visible en terre, car, n'étant point lié pour l'interprétation de la Parole de Dieu à aucune supérieure autorité, chacun prend le parti que bon lui semble : c'est ce que dit le Sage, les superbes sont toujours en dissension (Proverbes, 13 : 10), qui est une marque de vraie hérésie. Ceux qui sont divisés en plusieurs partis ne peuvent être appelés du nom d'Église, parce que, comme dit saint Jean Chrysostome, " le nom d'Église est un nom de consentement et de concorde ". Mais quant à nous autres, nous avons tous un même canon des Ecritures, et un même chef, et pareille règle pour les entendre; vous avez diversité de canon, et en l'intelligence vous avez autant de textes et de règles que vous êtes de personnes. Nous sonnons tous au ton de la trompette d'un seul Gédéon, et avons tous un même esprit de foi au Seigneur et à son lieutenant, l'épée des décisions (Jud. 7 : 20) de Dieu et de l'Église, selon la parole des Apôtres (Actes, 15 : 28) : Visum est Spiritui Sancto et nobis. Cette unité de langage est en nous un vrai signe que nous sommes l'armée du Seigneur, et vous ne pouvez être reconnus que pour Madianites, qui ne faites en vos opinions que criailler et hurler chacun à sa mode, chamailler les uns sur les autres, vous entr'égorgeant et massacrant vous mêmes par vos dissensions, ainsi que dit Dieu par Isaïe : Les Egyptiens choqueront contre les Egyptiens, et l'esprit d'Egypte se rompra (19 : 2-3) : et saint Augustin dit que " comme Donatus avait tâché de diviser Christ, ainsi lui-même par une journelle séparation [i.e. par une séparation qui arrive chaque jour] des siens était divisé en lui même ". Cette seule remarque doit vous faire quitter votre prétendue église, car, qui n'est avec Dieu est contre Dieu (Matthieu, 12 : 30) ; Dieu n'est point en votre église, car il n'habite point qu'en lieu de paix, et en votre église il n'y a ni paix ni concorde.

 

ARTICLE V   DE LA SAINTETE DE L'ÉGLISE : MARQUE SECONDE

L'Église de Notre Seigneur est sainte : c'est un article de foi. Notre Seigneur s'est donné pour elle, afin de la sanctifier (Ephésiens, 5 : 26); c'est un peuple saint, dit saint Pierre (1 Pierre, 2 : 9) ; l'Epoux est saint, et l'Epouse sainte; elle est sainte étant dédiée à Dieu, ainsi que les aînés en l'ancienne synagogue furent appelés saints, pour ce seul respect (Exode, 13 : 2; Luc, 2 : 23). Elle est sainte encore parce que l'Esprit qui la vivifie est saint (Jean, 6 : 64 ; Romains, 8 : 11), et parce qu'elle est le corps mystique d'un chef qui est très saint (Ephésiens, 1 : 22-23). Elle l'est encore parce que toutes ses actions intérieures et extérieures sont saintes; elle ne croit, ni espère, ni aime que saintement; en ses prières, prédications, Sacrements, Sacrifice, elle est sainte. Mais cette Église a sa sainteté intérieure, selon la parole de David (Psaumes, 44 : 14-15). Toute la gloire de cette fille royale est au-dedans; elle a encore sa sainteté extérieure, en franges d'or environnée de belles variétés. La sainteté intérieure ne peut se voir; l'extérieure ne peut servir de marque, parce que toutes les sectes s'en vantent, et qu'il est malaisé de reconnaître la vraie prière, prédication et administration des Sacrements. Mais, outre tout cela, il y a des signes avec lesquels Dieu fait connaître son Église, qui sont comme parfums et odeurs, comme dit l'Epoux dans les Cantiques (4 : 11) : L'odeur de tes vêtements comme l'odeur de l'encens; ainsi pouvons-nous, à la piste de ses odeurs et parfums (1, 3), chercher et trouver la vraie Église, et le gîte du fils de la licorne (Ps 28, 6).

 

ARTICLE VI    LA VRAIE ÉGLISE DOIT RELUIRE EN MIRACLES

L'Église, donc, a le lait et le miel sous sa langue (Cantiques, 4 : 11), en son cœur, qui est la sainteté intérieure, que nous ne pouvons pas voir; est comme une robe richement " parée de l'or d'Ophir " (Psaumes, 44 : 10), qui est la sainteté extérieure, laquelle peut se voir. Mais, parce que les sectes et hérésies déguisent leurs vêtements en même façon sous une fausse étoffe, outre cela elle a des parfums et odeurs qui lui sont propres, et ce sont certains signes et lustres de sa sainteté, qui lui sont tellement propres qu'aucune autre assemblée ne s'en peut vanter, particulièrement en notre âge : car, premièrement, elle reluit en miracles, qui sont très suaves odeurs et parfums, signes express de la présence de Dieu immortel ; ainsi les appelle saint Augustin (Confessions, 1 9, 7) Et de fait, quand Notre Seigneur partit de ce monde, il promit que l'Église serait suivie de miracles : Ces marques, dit-il, suivront les croyants : " en mon nom ils chasseront les diables, ils parleront nouveaux langages, ils ôteront les serpents, le venin ne leur nuira point, et par l'imposition des mains ils guériront les malades " (Marc, 17 : 18). Considérons, je vous prie, de près ses paroles.

1. - Il ne dit pas que les seuls Apôtres feraient ces miracles, mais simplement ceux qui croiront.

2. - Il ne dit pas que tous les croyants en particulier feraient des miracles, mais que ceux qui croiront seront suivis de ces signes.

3. - Il ne dit pas que ce fut seulement pour dix ans, ou vingt ans, mais simplement que ces miracles accompagneront les croyants. Notre Seigneur donc parle aux Apôtres seulement, mais non pour les Apôtres seulement; il parle des croyants en corps et en général, à savoir de l'Église; il parle absolument, sans distinction de temps .Laissons ces saintes paroles en l'étendue que Notre Seigneur leur a donnée : les croyants sont en l'Église, les croyants sont suivis de miracles, donc en tous temps il y a des miracles. Mais voyons un peu pourquoi le pouvoir des miracles fut laissé en l'Église : ce fut sans doute pour confirmer la prédication évangélique; car saint Marc le témoigne, et saint Paul, qui dit (Hébreux, 2 : 4) que Dieu donnait témoignage à la foi qu'il annonçait, par miracles. Dieu mit en mains de Moïse ces instruments afin qu'il fût cru (Exode, 4), dont Notre Seigneur dit que s'il n'eut fait des miracles les Juifs n'eussent pas été obligés de le croire (Jean, 15 : 24). Or sus, l'Église ne doit-elle pas toujours combattre l'infidélité ? Et pourquoi donc voudriez-vous lui ôter ce bon bâton que Dieu lui a mis en main ? Je sais bien qu'elle n'en a pas tant de nécessité qu'au commencement; après que la sainte plante de la foi a pris bonne racine on ne la doit pas si souvent arroser; mais aussi, vouloir lever en tout l'effet, la nécessité et cause demeurant en bonne partie, c'est très mal philosopher. Outre cela, je vous prie, montrez-moi quelque saison en laquelle l'Église visible ait été sans miracles, dès qu'elle commença jusqu'a présent. Au temps des Apôtres se firent infinis miracles, vous le savez bien; après ce temps-là, qui ne sait le miracle conté par Marc Aurèle Antonin, fait par les prières de la légion des soldats chrétiens qui étaient en son armée, laquelle pour cela fut appelée Fulminante ? Qui ne sait les miracles de saint Grégoire Thaumaturge, saint Martin, saint Antoine, saint Nicolas, saint Hilarion, et les merveilles qui arrivèrent aux Théodose et Constantin ? De quoi les auteurs sont irréprochables, Eusèbe, Rufin, saint Jérôme, Basile, Sulpice, Athanase. Qui ne sait encore ce qui advint en l'invention de la sainte Croix, et au temps de Julien l'Apostat ? Au temps de saint Chrysostome, Ambroise, Augustin, on a vu plusieurs miracles qu'eux mêmes content. Pourquoi voulez-vous donc que la même Église cesse maintenant d'avoir des miracles ? Quelle raison y aurait-il ? Pour vrai, ce que nous avons toujours vu, en toutes sortes de saisons, accompagner l'Église, nous ne pouvons l'appeler que propriété de l'Église : la vraie Église qui fait paraître sa sainteté par miracles. Que si Dieu rendait si admirable et le Propitiatoire, et son Sinaï, et son buisson ardent, parce qu'il y voulait parler avec les hommes, pourquoi n'a il rendu miraculeuse son Église, en laquelle il veut à jamais demeurer ?

 

ARTICLE VII    L'ÉGLISE CATHOLIQUE EST ACCOMPAGNÉE DE MIRACLES  ET LA PRÉTENDUE NE L'EST POINT

Ici maintenant je désire que vous vous montriez raisonnables, sans chicaneries et opiniâtreté. Informations prises dûment et authentiquement, on trouve que, sous le commencement de ce siècle, saint François de Paule a fleuri en miracles indubitables, comme est la ressuscitation des morts; on en trouve tout autant de saint Diègue d'Alcala : ce ne sont pas bruits incertains, mais preuves assignées, informations prises. Oseriez-vous nier l'apparition de la Croix faite au vaillant et catholique capitaine Albuquerque et à toutes siennes gens en Camarane, que tant d'historiens écrivent (Vide Maffaeum, Hist. Ind., l. 5), et à laquelle tant de gens avaient eu part ? Le dévot Gaspard Berzee, aux Indes, guérissait les malades priant seulement Dieu pour eux à la Messe, et si soudainement qu'autre que la main de Dieu ne l'eut pu faire. Le bienheureux François Xavier a guéri des paralytiques, sourds, muets, aveugles, a ressuscité [ranimé] un mort, son corps n'a peut-être consumé quoi qu'il eut été enterré avec de la chaux, comme ont témoigné ceux qui l'ont vu entier quinze mois après sa mort (Maff., l. 15) ; [...] . En Méliapor on a trouvé une croix, incise sur une pierre, laquelle on estime avoir été enterrée par les chrétiens du temps de saint Thomas : chose admirable néanmoins véritable, presque toutes les années, environ la fête de ce glorieux Apôtre, cette croix-là sue abondance de sang, ou liqueur semblable au sang, et change de couleur,  se rendant blanche pâle, puis noire, et tantôt de couleur bleue resplendissante et très agréable, enfin elle revient à sa couleur naturelle; ce que tout le peuple voit, et l'évêque de Cocine en a envoyé une publique attestation, avec l'image de la croix, au saint Concile de Trente (Maff l 2). Ainsi se font les miracles aux Indes où la foi n'est encore du tout affermie; desquels je laisse un monde, pour me tenir en la brièveté que je dois. Le bon Père Louis de Grenade, en son Introduction sur le Symbole, conte plusieurs miracles récents et irréprochables. Entre autres, il produit la guérison que les Rois de France catholiques ont fait, de notre âge même, de l'incurable maladie des écrouelles, ne disant autre que ces paroles : " Dieu te guérit, le Roi te touche ", n'y employant autre disposition que de se confesser et communier ce jour-là. J'ai lu l'histoire de la miraculeuse guérison de Jacques, fils de Claude André, de Belmont, au bailliage de Baulme, en Bourgogne : il avait été huit années durant muet et impotent; après avoir fait sa dévotion en l'église de saint Claude le jour même de la fête, huitième Juin 1588, il se trouva tout soudainement sain et guéri. Cela ne l'appelez-vous pas miracle ? Je parle de chose voisine, j'ai lu l'acte public, j'ai parlé au notaire qui l'a reçu et expédié, bien et dûment signé, Vion; il n'y manqua pas de témoins, car il y avait du peuple par milliers. Mais vais-je m'arrêter à vous produire les miracles de notre âge ? Saint Malachie, saint Bernard et saint François n'étaient-ils pas de Notre Église ? Vous ne le sauriez nier; ceux qui ont écrit leurs vies sont très saints et doctes, car même saint Bernard a écrit celle de saint Malachie, et saint Bonaventure celle de saint François, auxquels ni la suffisance ni la conscience ne manquaient point, et néanmoins ils y racontent plusieurs grands miracles : mais surtout les merveilles qui se font maintenant, à nos portes, à la vue de nos Princes et de toute Notre Savoie, près de Mondevis, devraient fermer la porte à toute opiniâtreté. Or sus, que direz-vous à ceci ? Direz-vous que l'Antichrist fera des miracles ? Saint Paul atteste qu'ils seront faux (2 Thessaloniciens, 2 : 9), et pour le plus grand que saint Jean produit (Apocalypse, 13 : 13), c'est qu'il fera descendre le feu du ciel. Satan peut faire tels miracles, mais plutôt en a fait sans doute; mais Dieu laissera un prompt remède à son Église, car à ces miracles-là les serviteurs de Dieu, Elie, Enoch, comme témoignent l'Apocalypse (11, 5-6) et les interprètes, opposeront des autres miracles de bien autre étoffe, car, non seulement ils se serviront du feu pour châtier miraculeusement leurs ennemis, mais auront pouvoir de fermer le ciel afin qu'il ne pleuve point, de changer et convertir les eaux en sang, et de frapper la terre du châtiment que bon leur semblera; trois jours et demi après leur mort ils ressusciteront et monteront au ciel, la terre tremblera à leur montée. Alors donc, par l'opposition de vrais miracles, les illusions de l'Antichrist seront découvertes, et comme Moïse  fit enfin confesser aux magiciens de Pharaon, Digitus Dei est hic (Exode, 8 : 19), ainsi Elie et Enoch feront enfin que leurs ennemis rendent gloriam Deo caeli (Apocalypse, 11 : 13). Elie fera en ce temps-là de ses saints tours de prophète, qu'il faisait jadis pour dompter l'impiété des Baalites et autres religionnaires (3 Rois, 18). Je veux donc dire 1. que les miracles de l'Antichrist ne sont pas tels que ceux que nous produisons pour l'Église, et partant il ne s'ensuit pas que, si ceux-là ne sont pas la marque de l'Église ceux-ci ne le soient pas non plus; ceux-là seront montrés faux et combattus par des plus grands et solides, ceux-ci sont solides, et personne n'en peut plus opposer de plus assurés. 2. Les merveilles de l'Antichrist ne seront qu'une boutade de trois ans et demi, mais les miracles de l'Église lui sont tellement propres que dès qu'elle est fondée elle a toujours été reluisante en miracles; en l'Antichrist les miracles seront forcement [illusoires], et ne dureront pas, mais en l'Église ils y seront naturellement en sa surnaturelle nature, et partant ils sont toujours, et toujours l'accompagnent, pour vérifier la parole, ces signes suivront ceux qui croiront (Marc, ult. 17). Vous diriez volontiers que les Donatistes ont fait des miracles, au rapport de saint Augustin (De Unit Eccles c 19); mais ce n'étaient que certaines visions et révélations, desquelles ils se vantaient sans aucun témoignage : certes, l'Église ne peut être prouvée vraie par ces visions particulières; au contraire, ces visions ne peuvent être prouvées ou tenues pour vraies sinon par le témoignage de l'Église, dit le même saint Augustin. Que si Vespasien a guéri un aveugle et un boiteux, les médecins mêmes, au récit de Tacite (Hist., l 4, , 81), trouvèrent que c'était un aveuglement et une perclusion qui n'étaient pas incurables; ce n'est donc pas merveille si le diable sut les guérir. Un juif étant baptisé se vint présenter à Paulus, évêque novatien, pour être rebaptisé, dit Socrate (Lib. 7, c. 17) ; l'eau des fonts tout incontinent s'évanouit : cette merveille ne se fit pas pour la confirmation du Novatianisme, mais du saint Baptême, qui ne devait pas être réitéré. Ainsi " quelques merveilles se sont faites ", dit saint Augustin (De civ. Dei, l 10, c 15), " chez les païens " : non pas pour preuve du paganisme, mais de l'innocence, de la virginité et fidélité, laquelle, où qu'elle soit, est aimée et prisée de son auteur; Or ces merveilles ne se sont faites que rarement; donc on n'en peut rien conclure : les nuées jettent quelques fois des éclairs, mais ce n'est que le soleil qui a pour marque et propriété d'éclairer. Fermons donc ce propos. L'Église a toujours été accompagnée de miracles solides et bien assurés, comme ceux de son Epoux, donc c'est la vraie Église; car, me servant en cas pareil de la raison du bon Nicodème (Jean, 3 : 2), je dirai : Nulla societas potest haec signa facere quae haec facit, tam illustria aut tam constanter, nisi Dominus fuerit cum illa  (Jean, 3 : 2) ; et comme disait Notre Seigneur aux disciples de saint Jean, Dicite, caeci vident, claudi ambulant, surdi audiunt (Matthieu, 11 : 4-5; Luc, 7 : 22), pour montrer qu'il était le Messie, ainsi, entendant qu'en l'Église se font de si solennels miracles, il faut conclure que vere Dominus est in loco isto (Genèse, 28 : 16). Mais quant à votre prétendue Église, je ne lui saurais dire autre sinon Si potest credere, omnia possibilia sunt credenti (Marc, 9 : 22); si elle était la vraie Église elle serait suivie de miracles. Vous me confesserez que ce n'est pas de votre métier de faire des miracles, ni de chasser les diables; une fois il réussit mal à l'un de vos grands maîtres qui s'en voulait mêler, ce dit Bolsec (In vita Calvini, c 13) : Illi de mortuis vivos suscitabant, ce dit Tertullien (De Praes., c 30) : istis de vivis mortuos faciunt. On fait courir un bruit que l'un des vôtres a guéri une fois un démoniaque; on ne dit toutefois point, où, quand, comment, la personne guérie, ni quelque certain témoin. Il est aisé aux apprentis d'un métier de s'équivoquer en leur premier essai; on fait souvent courir certains bruits parmi vous pour entretenir le simple peuple en haleine, mais n'ayant point d'auteur ne doivent avoir point d'autorité : outre ce que, à l'expulsion du diable, il ne faut tant regarder ce qui se fait, comme il faut considérer la façon et la forme comme on le fait; si c'est par oraisons légitimes et invocations du nom de Jésus-Christ. Puis, une hirondelle ne fait pas le printemps; c'est la suite perpétuelle et ordinaire des miracles qui est La marque de la vraie Église, non accident : mais ce serait se battre avec l'ombre et le vent, de réfuter ce bruit, si lâche et si débile que personne n'ose dire de quel côté il est venu. Toute la réponse que j'ai vue chez vous, en cette extrême nécessité, c'est qu'on vous fait tort de vous demander des miracles : aussi fait-on, je vous promets ; c'est se moquer de vous, comme qui demanderait à un maréchal qu'il mit en œuvre une émeraude ou diamant. Aussi ne vous en demande-je point; seulement je vous prie que vous confessiez franchement que vous n'avez pas fait votre apprentissage avec les Apôtres, Disciples, Martyrs et Confesseurs, qui ont été maîtres du métier. Mais quand vous dites que vous n'avez pas besoin de miracles parce que vous ne voulez établir une foi nouvelle, dites-moi donc encore si saint Augustin, saint Jérôme, saint Grégoire, saint Ambroise et les autres prêchaient une nouvelle doctrine, et pourquoi donc se faisait-il tant de miracles et si signalés comme ils produisent ? Certes, l'Evangile était mieux reçu au monde qu'il n'est maintenant, il y avait de plus excellents pasteurs, plusieurs martyres et miracles avaient précédé, mais l'Église ne laissait pas d'avoir encore ce don des miracles, pour un plus grand lustre de la très sainte Religion. Que si les miracles doivent cesser en l'Église, c'eut été au temps de Constantin le Grand, après que l'Empire fut fait chrétien, que les persécutions cessèrent, et que le christianisme était bien assuré, mais tant s'en faut qu'ils cessassent alors, qu'ils multiplièrent de tous côtés. Au bout de là, la doctrine que vous prêchez n'a jamais été annoncée, en gros, en détail; vos prédécesseurs hérétiques l'ont prêchée, auxquels vous vous accordez avec chacun en quelque point et avec nul en tous, ce que je ferai voit ci-après. Votre église où était-elle, il y a 80 ans ? Elle ne fait que d'éclore, et vous l'appelez vieille. Ha ! ce dites-vous, nous n'avons point fait une nouvelle église, nous avons frotté et épuré cette vieille monnaie, laquelle, étant longtemps demeurée couverte dans les masures, s'était toute noircie, et souillée de crasse et moisie. Ne dites plus cela, je vous prie, que vous avez le métal et le calibre; la foi, les Sacrements, ne sont-ce pas des ingrédients nécessaires pour la composition de l'Église ? Et vous avez tout changé, et de l'un et de l'autre ; vous êtes donc de faux monnayeurs, si vous ne montrez le pouvoir que vous prétendez de battre sur le coin du Roi tels calibres. Mais ne nous arrêtons pas ici : avez vous épuré cette Église ? Avez-vous nettoyé cette monnaie ? Montrez-nous donc les caractères qu'elle avait quand vous dites qu'elle chut en terre, et qu'elle commença à se rouiller. Elle tomba, ce dites-vous, au temps de saint Grégoire ou peu après. Dites ce que bon vous semblera, mais en ce temps-là elle avait le caractère des miracles; montrez-le nous maintenant, car, si vous ne vous montrez bien particulièrement l'inscription et l'image du Roi en votre monnaie, et nous la vous montrons en la Nôtre, la Nôtre passera comme loyale et franche, la vôtre, comme courte et rognée, sera renvoyée au billon. Si vous nous voulez représenter l'Église en la forme qu'elle avait au temps de saint Augustin, montrez-la nous non seulement bien dénotée mais bienfaisante en miracles et saintes opérations, comme elle était alors. Que si vous vouliez dire qu'alors elle était plus nouvelle que maintenant, je vous répondrais, qu'une si notable interruption comme est celle que vous prétendez, de 900 ou mille ans, rend cette monnaie si étrange que si on n'y voit en grosses lettres les caractères ordinaires, l'inscription et l'image, nous ne la recevrons jamais. Non, non, l'Église ancienne était puissante en toute saison, en adversité et prospérité, en œuvres et en paroles, comme son Epoux, la vôtre n'a que le babil, soit en prospérité ou adversité; à moins qu'elle montre maintenant quelques vestiges de l'ancienne marque, autrement jamais elle ne sera reçue comme vraie Église, ni fille de cette ancienne Mère. Que si elle s'en veut vanter davantage, on lui imposera silence avec ces saintes paroles : Si filii Abrahae estis, opera Abrahae facite (Jean, 8, 39) : la vraie Église des croyants doit toujours être suivie de miracles, il n'y a point d'Église en Notre âge qui en soit suivie que la Nôtre, la Nôtre donc seule est la vraie Église.

 

ARTICLE VIII    L'ESPRIT DE PROPHETIE DOIT ÊTRE EN LA VRAIE ÉGLISE

La prophétie est un très grand miracle, qui consiste en la certaine connaissance que l'entendement humain a des choses sans expérience ni aucun discours naturel, par l'inspiration surnaturelle; et partant, tout ce que j'ai dit des miracles en général doit être employé en ceci : mais, outre cela, le prophète Joël prédit (2 : 28-29) qu'au dernier temps, c'est-à-dire au temps de l'Église évangélique, comme interprète saint Pierre, Notre Seigneur répandrait son Saint-Esprit sur ses serviteurs et servantes et qu'ils prophétiseraient (Actes, 2 : 17); comme Notre Seigneur avait dit : " Ces signes suivront ceux qui croiront " (Marc, ult. 17). Donc, la prophétie doit toujours être en l'Église, où sont les serviteurs et servantes de Dieu, et où il répand toujours son Saint-Esprit. L'Ange dit, en l'Apocalypse, que le témoignage de Notre Seigneur c'est l'esprit de prophétie (19 : 10) : or, ce témoignage de l'assistance de Notre Seigneur n'est pas seulement donné pour les fidèles, mais principalement pour les infidèles, dit saint Paul (1 Corinthiens, 14 : 22); comme donc diriez-vous que Notre Seigneur l'ayant donné une fois à son Église il le lui enleva par après ? Le principal sujet pour lequel il lui a été concédé y est encore, donc la concession dure toujours. Ajoutez, comme je le disais des miracles, qu'en toutes les saisons l'Église a eu des prophètes; nous ne pouvons donc dire que ce ne soit une de ses propriétés et une bonne pièce de son douaire. Jésus-Christ, montant aux cieux, a mené la captivité captive et a donné des dons aux hommes; car il a donné les uns pour apôtres, les autres pour prophètes, les autres pour évangélistes, les autres pour pasteurs et docteurs (Ephésiens, 4 : 8-11) : l'esprit apostolique, évangélique, pastoral et doctoral est toujours en l'Église, et pourquoi lui enlèvera-t-on encore l'esprit prophétique ? C'est un parfum de la robe de cette Epouse (Cantiques, 4 : 11).  

 

ARTICLE IX    L'ÉGLISE CATHOLIQUE A L'ESPRIT DE PROPHÉTIE, LA PRÉTENDUE NE L'A POINT

Il n'y a presque point eu de saints en l'Église qui n'aient prophétisé. Je nommerai seulement ceux-ci plus récents : saint Bernard, saint François, saint Dominique, saint Antoine de Padoue, sainte Brigitte, sainte Catherine de Sienne, qui furent très assurés Catholiques; les saints desquels j'ai parlé ci-dessus sont du nombre, et en notre âge, Gaspard Berzee et François Xavier. Il n'y a celui de nos aïeux qui ne racontait très assurément quelque prophétie de Jehan Bourgeois, plusieurs desquels l'avaient vu et entendu. Le témoignage de Notre Seigneur c'est l'esprit de prophétie (Apocalypse, ut supra). Produisez-nous maintenant quelqu'un des vôtres qui ait prophétisé pour votre église. Nous savons que les Sibylles furent comme les prophétesses des Gentils, desquelles parlent presque tous les Anciens; Balaam aussi prophétisa (Nombres, 22-24), mais c'était pour la vraie Église; et partant leur prophétie n'autorisait pas l'église; en laquelle elle se faisait, mais celle pour laquelle elle se faisait : quoique je ne nie pas qu'entre les Gentils il n'y eut une vraie Église de peu de gens, ayans la foi d'un vrai Dieu et l'observation des commandements naturels en recommandation, par la grâce divine; témoin Job en l'ancienne Ecriture, et le bon Cornelius avec ses autres soldats craignant Dieu (Actes, 10 : 2, 7), en la nouvelle. Or, où sont vos prophètes ? Et si vous n'en avez point, croyez que vous n'êtes pas du corps pour l'édification duquel Notre Seigneur les a laissés, au dire de saint Paul (Ephésiens, 4 : 11-12); aussi, le témoignage de Notre Seigneur c'est l'esprit de prophétie. Calvin a voulu, ce semble, prophétiser, en la préface sur son Catéchisme de Genève, mais sa prédiction est tellement favorable à l'Église catholique, que quand nous en aurons l'effet nous serons contents de le tenir pour prophète.

 

ARTICLE X    LA VRAIE ÉGLISE DOIT PRATIQUER LA PERFECTION DE LA VIE CHRETIENNE

Voici des rares enseignements de Notre Seigneur et de ses Apôtres. Un jeune homme riche protestait d'avoir observé les commandements de Dieu en sa tendre jeunesse; Notre Seigneur, qui voit tout, le regardant l'aima,  signe qu'il était tel qu'il avait dit, et néanmoins il lui donne cet avis : " Si tu veux être parfait, va, vends tout ce que tu as, et tu auras un trésor au ciel, et suis-moi " (Marc, 10 : 17-21; Matthieu, 19 : 16-21). Saint Pierre nous invite avec son exemple et de ses compagnons : " Voici, nous avons tout laissé et t'avons suivi "; Notre Seigneur recharge avec cette solennelle promesse : " Vous qui m'avez suivi serez assis  sur douze chaires, jugeant les douze tribus d'Israël, et quiconque laissera sa maison, ou ses frères, ou ses sœurs, ou son père, ou sa mère, ou sa femme, ou ses enfants, ou ses champs, pour mon nom, il en recevra le centuple, et possèdera la vie éternelle " (Matthieu, 19 : 27-29) . Voilà les paroles, voici l'exemple : Le fils de l'homme n'a pas de lieu où il puisse reposer sa tête " (Ibid., 8 : 20); il a été tout pauvre pour nous enrichir (2 Corinthiens, 8 : 9) ; il vivait d'aumônes, dit saint Luc (8 : 3) : Mulieres aliquae ministrabant ei de facultatibus suis; en deux Psaumes (Psaumes, 108 : 22; 39 : 18) qui touchent proprement sa personne, comme interprètent saint Pierre (Actes, 1 : 20) et saint Paul (Hébreux, 10 : 7), il est appelé mendiant; quand il envoie prêcher ses Apôtres, il les enseigne : Nequid tollerent in via nisi virgam tantum, et qu'ils ne portassent ni pochette, ni pain, ni argent à la ceinture, mais chaussés de sandales, et qu'ils ne fussent affublés de deux robes (Marc, 6 : 8-9). Je sais que ces enseignements ne sont pas des commandements absolus, quoique le dernier fut un commandement pour un temps; aussi n'en veux-je rien dire autre sinon que ce sont de très salutaires conseils et exemples. En voici encore d'autres semblables, sur un autre sujet : " Il y a des eunuques qui sont ainsi nés du ventre de leur mère, il y a aussi des eunuques qui ont été faits par les hommes, et il y a des eunuques qui se sont châtrés eux-mêmes pour le royaume des cieux " : qui potest capere, capiat, " qui peut comprendre comprenne " (Matthieu, 19 : 12). C'est cela même qui avait été prédit par Isaïe : " Que l'eunuque ne dise point, voici je suis un arbre sec, parce que le Seigneur dit ainsi aux eunuques : qui garderont mes Sabbats, et choisiront ce que je veux, et tiendront mon alliance, je leur baillerai, en ma maison  et en mes murailles, une place et un nom meilleur que les enfants et les filles, je leur baillerai un nom sempiternel qui ne périra point ". Qui ne voit ici que l'Evangile va justement joindre à la prophétie ? Et en l'Apocalypse (14, 3, 4), " ceux qui chantaient un cantique nouveau, qu'autre qu'eux ne pouvait dire, c'étaient ceux qui ne s'étaient point souillés avec les femmes, parce qu'ils étaient vierges ; ceux-là suivent l'Agneau où qu'il aille ". C'est ici où se rapportent les exhortations de saint Paul : " Il est bon à l'homme de ne point toucher la femme " (1 Corinthiens, 7 : 1). " Or je dis à qui n'est pas marié, et aux veuves, qu'il leur sera bon de demeurer ainsi, comme moi " (verset 8). " Quant aux vierges, je n'en ai point de commandement, mais j'en donne conseil, comme ayant reçu miséricorde de Dieu d'être fidèle" (verset 25). Voici la raison : " Qui est sans femme, il est soigneux des choses du Seigneur, comme il plaira à Dieu, mais qui est avec sa femme, il a soin des choses du monde, comme il agréera à sa femme, et est divisé; et la femme non mariée et la vierge pensent aux choses du Seigneur, pour être saintes de corps et d'esprit, mais celle qui est mariée pense aux choses mondaines, comme elle plaira à son mari. Au reste, je dis ceci pour votre profit; non pour vous tendre un piège, mais pour ce qui est honnête, et qui vous facilite le moyen de servir Dieu sans empêchements " (versets 32-35). Après : " Donc qui joint en mariage sa pucelle il fait bien, et qui ne la joint point fait mieux " (verset 38). Puis, parlant de la veuve : " Qu'elle se marie à qui elle voudra, pourvu que ce soit en Notre Seigneur, mais elle sera plus heureuse si elle demeure ainsi, selon mon conseil; or je pense que j'ai l'esprit de Dieu " (verset ult.). Voilà les instructions de Notre Seigneur et des Apôtres, et voici l'exemple de Notre Seigneur, de Notre-Dame, de saint Jean-Baptiste, de saint Paul, saint Jean et saint Jaques, qui ont tous vécu en virginité, et, en l'Ancien Testament, Elie, Elisée, comme ont remarqué les Anciens. Enfin, la très humble obéissance de Notre Seigneur, qui est si particulièrement notée dans les Evangiles, non seulement à son Père (Jean, 6 : 38), à laquelle il était obligé, mais à saint Joseph (Luc, 2 : 51), à sa Mère, à César auquel il paya le tribut (Matthieu, 17, ult.), et à toutes les créatures, en sa Passion, pour l'amour de nous : Humiliavit semetipsum, factus obediens usque ad mortem, mortem autem crucis (Philippiens, 2 : 8). Et l'humilité qu'il montre d'être venu enseigner, quand il dit : " Le fils de l'homme n'est pas venu pour être servi, mais pour servir " (Matthieu, 20, 28). " Je suis entre vous comme celui qui sert " (Luc, 22 : 27). Ne sont-ce pas des perpétuelles répliques et expositions de cette tant douce leçon, " Apprenez de moi que je suis débonnaire et humble de courage " (Matthieu, 11 : 29) ? Et de cette autre : " Si quelqu'un veut venir après moi, qu'il renonce à soi-même, qu'il prenne sa croix tous les jours, et qu'il me suive " (Luc, 9, 23) ? " Qui garde les commandements il renonce assez à soi-même pour être sauvé, c'est bien assez s'humilier pour être exalté " (Matthieu, 23 : 12), mais d'ailleurs il reste une autre obéissance, humilité et renoncement de soi-même, auquel l'exemple et les enseignements de Notre Seigneur nous invitent. Il veut que nous apprenions de lui l'humilité, et il s'humiliait, non seulement à qui il était inférieur en tant qu'il portait évidemment, car, sur le modèle de la perfection de vie qu'ont tenue et conseillée les Apôtres, une infinité de chrétiens ont si bien formé la leur que les histoires en sont pleines. Qui ne sait combien sont admirables les rapports que fait Philon le Juif de la vie des premiers chrétiens en Alexandrie, au livre intitulé De vita supplicum, ou Traité de saint Marc et ses disciples ? comme témoignent Eusèbe, Nicéphore, saint Jérôme et, entre autres, Epiphane qui dit que Philon écrivant des Jesséens il parlait des chrétiens, qui pour quelque temps après l'Ascension de Notre Seigneur, pendant que saint Marc prêchait en Egypte, furent ainsi appelés, ou à cause de Jessé de la race duquel fut Notre Seigneur, ou à cause du nom de Jésus, nom de leur Maître et qu'ils avaient toujours en bouche : or, qui verra les livres de Philon, connaîtra en ces Jesséens et thérapeutes, guérisseurs ou serviteurs, une très parfaite renonciation de soi-même, de sa chair et de ses biens. Saint Martial, disciple de Notre Seigneur, en une épître qu'il écrit aux Tholosains, raconte qu'à sa prédication la bienheureuse Valéria, épouse d'un roi terrestre, avait voué la virginité de corps et d'esprit au Roi céleste. Saint Denis, en sa Ecclésiastique Hiérarchie (6 : 1, 3), raconte que les Apôtres, ses maîtres, appelaient les religieux de son temps thérapeutes, c'est-à-dire, serviteurs ou adorateurs, pour le spécial service et culte qu'ils faisaient à Dieu, ou moines, à cause de l'union à Dieu en laquelle ils s'avançaient. Voilà la perfection de la vie évangélique bien pratiquée en ce premier temps des Apôtres et leurs disciples, lesquels ayant frayé ce chemin du ciel si droit et montant, y ont été suivis à la file de plusieurs excellents chrétiens. Saint Cyprien garda la continence et donna tout son bien aux pauvres, au récit de Pontius, diacre; autant en firent saint Paul, premier ermite, saint Antoine et saint Hilarion, témoin saint Athanase et saint Jérôme, saint Paulin, évêque de Nole, témoin saint Ambroise, issu d'illustre famille en Guyenne, donna tout son bien aux pauvres, et, comme déchargé d'un pesant fardeau, dit adieu à son pays et à son parentage, pour servir plus attentivement son Dieu; de l'exemple duquel se servit saint Martin pour quitter tout et pour inciter les autres à la même perfection. Georges, Patriarche Alexandrin, conte que saint Chrysostome abandonna tout et se rendit moine. Potitianus, gentilhomme africain, revenant de la cour de l'Empereur, raconta à saint Augustin qu'en Egypte il y avait un grand nombre de monastères et religieux, qui représentaient une grande douceur et simplicité en leurs mœurs, et comme il y avait un monastère à Milan, hors ville, garni d'un bon  nombre de religieux, vivant en grande union et fraternité, desquels saint Ambroise, évêque du lieu, était abbé, il leur raconta aussi, qu'auprès de la ville de Trèves il y avait un monastère de bons religieux, où deux courtisans de l'Empereur s'étaient rendus moines, et que deux jeunes damoiselles, qui étaient fiancées à ces deux courtisans, ayant entendus la résolution de leurs époux, vouèrent pareillement à Dieu leur virginité, et se retirèrent du monde pour vivre en religion, pauvreté et chasteté : c'est saint Augustin qui fait ce récit (Confessions, l. 8, c. 6). Possidius en raconte tout autant de lui, et qu'il institua un monastère, ce que saint Augustin lui-même conte en une sienne épître (211). Ces grands Pères ont été suivis de saint Grégoire, Damascène, Bruno, Romuald, Bernard, Dominique, François, Louis, Antoine, Vincent, Thomas, Bonaventure, qui tous, ayant renoncé et dit un éternel adieu au monde et à ses pompes, se sont présentés en un holocauste parfait au Dieu vivant. Maintenant, concluons : ces conséquences me semblent inévitables. Notre Seigneur a fait coucher en ses Ecritures ces avertissements et conseils de chasteté, pauvreté et obéissance, il les a pratiqués et fait pratiquer en son Église naissante; toute l'Ecriture et toute la vie de Notre Seigneur n'était qu'une instruction pour l'Église, l'Église donc devait en faire son profit, ce devait donc être un des exercices de l'Église que cette chasteté, pauvreté et obéissance ou renoncement de soi-même; item, l'Église a toujours fait cet exercice en tous temps et en toutes saisons, c'est donc une de ses propriétés : mais à quel propos tant d'exhortations si elles n'eussent dû être pratiquées ? La vraie Église donc doit reluire en la perfection de la vie Chrétienne ; non déjà que chacun en l'Église soit obligé de la suivre, il suffit qu'elle se trouve en quelques membres et parties signalées, afin que rien ne soit écrit ni conseillé en vain, et que l'Église se serve de toutes les pièces de la Sainte Ecriture.

 

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